Mardi avril 16th 2024

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Le Cid : La vengeance pour… l’honneur

A la cour de Castille, Rodrigue et Chimène s’aiment et sont promis au mariage. Cependant, à la suite d’une querelle les opposants pour la fonction de gouverneur du prince, le comte don Gormas, père de Chimène, a humilié d’un soufflet don Diégue, père de Rodrigue. Don Diégue, vieil homme, est dans l’impossibilité de se venger en raison de son grand âge. De fait, il transmet dans un vibrant appel à son fils, la dangereuse et cruelle mission de la sauvegarde de son honneur bafoué.

« La vengeance pour l’honneur bafoué »


Pierre de Corneille, Le Cid – Acte I, scène 5 – 1637


Don Diégue

Rodrigue, as-tu du cœur ?

Don Rodrigue

Tout autre que mon père,

L’éprouverait sur l’heure

Don Diégue

Digne ressentiment à ma douleur bien doux !

Je reconnais mon sang à ce noble courroux,

Ma jeunesse revit en cette ardeur si prompte.

Viens, mon fils, viens, mon sang, viens réparer ma honte,

Viens me venger.

Don Rodrigue

De quoi ?

Don Diégue

D’un affront si cruel

Qu’à l’honneur de tous deux il porte un coup mortel :

Mais mon âge a trompé ma généreuse envie

Et ce fer, que mon bras ne peut plus soutenir,

Je le remets au tien pour venger et punir.

Va contre un arrogant éprouver ton courage :

Ce n’est que dans le sang qu’on lave untel outrage,

Meurs ou tue. Au surplus, pour ne te point flatter,

Je te donne à combattre un homme à redouter :

Je l’ai vu, tout couvert de sang et de poussière,

Porter partout l’effroi dans une armée entière.

J’ai vu par sa valeur cent escadrons rompus

Et pour t’en dire encor quelque chose de plus,

Plus que brave soldat, plus grand capitaine,

C’est…

Don Rodrigue

De grâce, achevez.

Don Diégue

Le père de Chimène.

Don Rodrigue

Le…

Don Diégue

Ne réplique point, je connais ton amour ;

Mais qui peut vivre infâme est indigne du jour.

Plus l’offenser est cher et plus grande est l’offense.

Enfin tu sais l’affront et tu tiens la vengeance :

Je ne te dis plus rien. Venge-moi, venge-toi,

Montre-toi digne fils d’un père tel que moi.

Accablé des malheurs où le destin me range,

Je vais les déplorer : va, cours, vole, et nous venge.

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